Chaque mois, quelques personnes se retrouvent pour se mettre ensemble à l’écoute de Madeleine Delbrêl comme des enfants le feraient près de leur grande sœur pour cueillir dans son expérience une saveur de vie.
Poète, artiste, à 15 ans elle proclame « Dieu est mort, vive la mort ! ». Elle le redécouvre à 20 ans grâce à des amis chrétiens. « Eblouie de Dieu », elle n’a alors qu’un désir « Vivre l’évangile au milieu des pauvres et des incroyants ». En 1933, avec deux équipières, elle s’installe à Ivry alors « bastion du communisme en France ». Elle devient assistante sociale à la Mairie. Leur maison est ouverte à tous : les gens du quartier, les réfugiés espagnols qui fuient le régime franquiste, ceux et celles qui, bien avant le Concile, s’interrogent sur la nécessité d’un renouveau missionnaire de l’Eglise.
Leur équipe, « La Charité », essaie de vivre la bonté comme et au milieu de « gens qui font un travail ordinaire, qui ont un foyer ordinaire ou sont des célibataires ordinaires. Des gens qui ont des maladies ordinaires, des deuils ordinaires. Des gens qui ont une maison ordinaire, des vêtements ordinaires, ce sont les gens de la vie ordinaire. Les gens que l’on rencontre dans n’importe quelle rue. (…) Nous autres, gens de la rue, croyons de toutes nos forces que cette rue, que ce monde où Dieu nous a mis est pour nous le lieu de notre sainteté. ».
En haut de l’escalier du métro, à quoi pense-t-elle ? Aux déserts que des missionnaires vont rejoindre loin de leur pays et, par contraste, aux déserts d’ici ! « Pouvoir arpenter toutes les rues, s’asseoir dans tous les métros, monter tous les escaliers, porter le Seigneur Dieu partout… et puis prier pour tous ces gens si près de Dieu, si près de nous ». « La Parole de Dieu veut se faire chair en nous ».
La veille du 14 juillet, entendant les flonflons du bal, elle s’adresse au Seigneur qui vient nous inviter à danser toute notre vie au rythme de son pas : le téléphone qui sonne, la vaisselle à faire, les choses qui nous ennuient ou nous réjouissent, … « Être comme un prolongement agile et vivant de vous. »
Quand la crise éclate dans l’Eglise lorsque Rome stoppe la mission des prêtres-ouvriers, bouleversée, elle court prier sur la tombe de Pierre à Rome. Elle continue d’être à l’écoute de tous (pour ou contre la décision). Plus tard, elle écrit : « L’Eglise, il faut s’acharner à la rendre aimable. L’Eglise, il faut s’acharner à la rendre aimante ». Et nous, que dirions-nous dans le contexte d’une autre crise, celle des abus et crimes sexuels ?
Commence-t-elle sa journée ? « Chaque matin, on trouve son prochain, son plus proche voisin qu’on voit tous les jours. C’est à travers lui qu’on dit bonjour au monde entier, qu’on salue le Seigneur ».
Formant de futures assistantes sociales, elle leur dit : « Accueillir les gens comme des gens et non comme des dossiers. (…) Il faut s’y préparer. Il faut savoir qu’on est là pour ça. Se préparer à recevoir en prenant plus fortement conscience de la grandeur des rencontres. »
A chaque rencontre, nous prenons un court texte d’elle, et, ensemble, tels que nous sommes, nous essayons de faire le va-et-vient entre ce qu’elle a écrit, ce qu’elle a vécu, ce que nous vivons. Venez nous rejoindre, une fois, deux fois, plus longtemps, si vous le souhaitez.
Par Bernadette Delizy – mai 2022 –
Prochaine rencontre le 9 septembre 2024.