Homélie de la nuit de Noël
Is 9, 1-6 ; Tt 2, 11-14 ; Lc 2, 1-14
En guise de méditation, je voudrais vous proposer ce soir de laisser résonner quelques unes de paroles que nous venons d’entendre.
Pourquoi ? Parce que les quelques mots choisis me semblent donner tout leur sens aujourd’hui à cette belle fête de Noël dans le contexte particulier présent.
Tout d’abord, le prophète Isaïe témoigne de la joie d’un peuple qui avance pourtant dans l’obscurité des événements lourds de son époque. Une lumière est venue éclairer sa nuit, celle d’une naissance. La naissance en ce monde d’un homme dont les noms sont un véritable programme de vie. Il est : « Conseiller-merveilleux, Dieu-Fort, Père-à-jamais, Prince-de-la-Paix ». Et il est tout cela par le fait de l’œuvre d ‘amour de Dieu.
C’est donc l’amour tel qu’il se manifeste divinement qui est lumineux pour notre vie humaine. C’est cet amour qui casse les jougs qui pèsent sur nos existences. Nos peines n’ont pas le dernier mot, ni le coronavirus, ni le confinement, ni l’isolement. Il appartient à la joie.
Deuxièmement, ce qui semblait limité à un peuple pour Isaïe, Paul le confesse comme une donnée universelle.
La naissance que nous célébrons à Noël est « grâce de Dieu… manifestée pour le salut de tous les hommes », sans aucune exception. Et en « attendant que se réalise la bienheureuse espérance : la manifestation de la gloire de notre grand Dieu et Sauveur, Jésus Christ », autrement dit l’aboutissement de ce dont Noël est comme le premier acte, il nous revient de « vivre dans le temps présent de manière raisonnable, avec justice et piété », toujours selon les mots de l’Apôtre. Il nous revient, touchés par le Christ, de faire signe à tous de sa présence, par une vie animée, irriguée par l’amour dont Noël est l’expression.
Et pour comprendre ce que cet amour signifie concrètement, nous pouvons enfin contempler ce que l’évangéliste rapporte. A un moment de notre histoire humaine, sous l’Empereur Auguste et le gouvernement de Quirinius, une autre naissance que celle annoncée par Isaïe fait signe à ceux dont le cœur est assez libres pour l’accueillir. Il s’agit de la naissance de celui qui sauve notre humanité, qui en fait une véritable œuvre d’art de savoir vivre. Il en fait une nourriture essentielle, en naissant dans une mangeoire. On ne trouve pas cette sorte de nourriture dans les magasins dits essentiels, en temps de pandémie, mais elle est à portée de cœur. Celui dont le cœur parle plus fort que la tête, qui n’est pas encombré de son savoir, de ce qu’il possède mais libre pour aimer sait reconnaître le signe. Cela oriente toute sa vie dans le sens de l’amour confiant. Cet amour est la « nourriture » essentielle des enfants. Aucun enfant ne peut s’épanouir sans amour, si tant est que les adultes le puissent. C’est sans doute la raison pour laquelle Jésus dans l’évangile non seulement nous invite à redevenir des enfants, mais, plus fort encore, il est le premier à épouser leur condition.
L’amour c’est Dieu qui se donne lui-même, sans réserve, sans retenue, sans défense ni arrière-pensée, sans revendiquer de place dans la salle commune. Plutôt que de nous donner des leçons, il vit ce qu’il nous invite à expérimenter. Voilà ce dont me semblent porteuses les paroles que nous venons d’entendre. Elles sont source d’une joie que rien n’entrave longtemps.
A Noël la parole d’amour éternelle se fait chair humaine, avec nous.
Quelle sera la réponse personnelle que nous souhaitons lui donner ?
Dominique RAMEAU